Quand commencer à lire des histoires aux enfants? Y a-t-il un âge? La lecture est-elle si importante, même pour les tous-petits? Que lire, comment le lire? Nous essayons de répondre à ces questions en dédiant l’article de la semaine aux livres pour enfants. Si raconter et lire des histoires est bien instinctif et spontané, sachez que .. il y a une raison! Voyons ensemble comment bébés et livres évoluent ensemble.
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Livres pour enfants, livres pour bébé
De ce que je me souviens, j’ai toujours aimé lire. J’imaginais souvent comment j’aurais pu transmettre ma passion à mes enfants; j’anticipais l’intimité d’une bonne histoire avant de nous coucher, tous sous les couettes, alors qu’il fait nuit dehors.
Cependant, je ne savais rien de ce qui se passe avant cette phase. Les livres mangés, tirés et lancés; les pages parcourues dans un ordre aléatoire; les distractions après deux minutes; l’interruption constante avec un millier de questions ..
Lire un livre à un jeune enfant peut être frustrant, si nous le faisons en imaginant l’utilisation du livre tel que nous adultes le faisons. Les livres pour enfants sont avant tout un jeu magnifique..
L’idée de cette article m’est venue en (re)lisant le livre de Lynne Murray, 'La psychologie des bébés'. Le dernier chapitre est consacré au partage de livres avec de jeunes enfants. Ça peut paraître un peu prématuré à première vue.. Comme par mes exemples ci-dessus. Comment lire un livre à un bébé? Pourtant, à priori c’est l’une des activités qui soutiennent le plus l’apprentissage du langage et le développement cognitif!
L’auteure indique certaines caractéristiques déterminantes pour l’efficacité de la lecture, en fonction de l’âge du bébé.
Il me semblait intéressant de les partager avec vous!
Livres pour enfants et langage : un soutien sans paire
Le livre dont je parle est spécialement dédié aux enfants de 0 à 2 ans. Donc, il ne faut pas s’attendre à lire à haute voix un récit de vingt pages avant de se coucher, comme je l’imaginais naïvement. Ce n’est pas encore l’heure!
J’ajoute : même maintenant que ma fille a 5 ans, je n’arrive pas à lui proposer des livres sans images par exemple. (Je pourrais rajouter : je n’arrive pas trop à lui imposer les lectures, point barre. Elle veut, à raison, choisir ses bouquins).
Les livres pour enfants de cette tranche d’âge sont donc très différents de ceux pour les enfants plus âgés. Et l’activité de lecture se déroule différemment. Moins intuitif pour nous.. Cela vaut la peine d’explorer le sujet!
Le mot clé dans ce cas est « partage »: les livres pour enfants de si jeune âge devraient être partagés. Avant tout, il s’agit de regarder ensemble, de toucher, de grimacer, de montrer les images, de nommer à haute voix le mot correspondant….Bref, de jouer!
Nous verrons ensuite comment l’attention de l’enfant évolue et par conséquent aussi la «lecture» des livres; ainsi que les principales caractéristiques des livres pour enfants en fonction de l’âge.
Les 4 éléments critiques dans l’apprentissage du langage pour les petits
- Le ton de la voix
- La répétition
- L’utilisation d’images
- La relation avec des personnes phisiques
Instinctivement, nous adultes nous adressons aux bébés avec une façon de parler particulière. Un ton de voix très emphatique, des phrases courtes, simples et répétées: Regards le ballon! T’as vu le ballon? Il est beau ce ballon! Oh oui, tu l’aimes bien ce ballon?!
et ainsi de suite. Pas besoin de souligner que nous n’utiliserions jamais ce ton avec un adulte, même pas avec un enfant de 5 ans.
La structure cérébrale des nouveau-nés leur permet de capturer, dans la langue à laquelle ils sont exposés, schémas et régularités. Nous sommes en fait programmés pour apprendre une langue.
La chose que je trouve extrêmement intéressante est que suite à une étude (dont je m’excuse, je ne me souviens plus les sources), on a constaté que les zones du cerveau qui permettent l’apprentissage du langage chez les bébés ne sont activées que pendant des interactions en face à face, avec es interlocuteurs physiquement présents; en revanche, elles ne sont pas activés si les enfants sont placés devant un écran (téléviseur, ordinateur, etc.).
Il est donc inutile d’espérer que nos petits « fassent l’oreille » à une langue étrangère simplement en regardant un dessin-animé ou en écoutant la télé … (je l’avais espéré …)
Pourquoi les livres pour enfants devraient aider à mieux apprendre le langage?
Parmi les éléments indiqués, le principal est que pendant cette activité, nous, les parents, nous passons beaucoup de temps à indiquer les figures d’objets, ou d’animaux, en répétant leur nom à haute voix.
Nous pouvons nous inspirer de l’histoire ou des images pour parler de sentiments, d’émotions, d’intentions et d’autres concepts abstraits. La répétition de cette expérience agréable renforce la connexion entre le son et le concept chez l’enfant.
À travers des images, les enfants peuvent avoir une expérience directe et indépendante de l’objet. Ceci est utile pour percevoir et connaître des éléments qui, dans la vie réelle, changent trop rapidement pour que leur cerveau les enregistre.
Par exemple, l’expression d’une émotion sur le visage de quelqu’un; ou des choses éloignées de leur réalité quotidienne (la mer si elles vivent en montagnes, les animaux de la ferme si elles vivent en ville, etc.).
En tournant les pages dans tous les sens, et avec le soutien verbal de l’adulte, les enfants peuvent, par exemple, percevoir des éléments abstraits et complexes tels que les relations de cause à effet; ou quelles actions peuvent déclencher certaines émotions; quelles intentions régissent certaines actions et ainsi de suite.
Quelle est la particularité des livres pour enfants de si jeune âge?
Non seulement le matériau (carton résistant, ou tissu, peut-être avec des inserts de matériaux différents pour une expérience tactile, etc.).
Les livres pour jeunes enfants ont généralement peu d’objets par page, sans aucun détail; les lignes et les couleurs sont simples; les éléments essentiels du dessin et de l’histoire sont répétés sur chaque page.
Astuces pour rendre la lecture efficace
- Commençons tôt, dès les premiers mois, pour faire des livres une partie intégrante de la vie quotidienne du bébé.
- Regardons les livres ensemble, régulièrement.
- Faisons de la « lecture » un moment agréable, serein et paisible.
- Soyons attentifs à ce qui suscite l’intérêt de notre enfant. Suivons ses « signaux » et faisons une pause ou soulignons ce qu’il aime, sans hésiter à tourner la page ou à arrêter l’activité si bébé montre des signes d’impatience ou de contrariété. Pour un bébé, se concentrer longtemps sur une activité peut être très fatigant et difficile. Si nous arrivons à faire de la lecture presque quotidiennement, et à un moment où nous sommes complètement disponibles et détendus, jour après jour nous deviendrons de plus en plus sensibles à la compréhension et interprétation des signaux que le bébé nous envoie, et rendrons cette expérience toujours plus agréable pour les deux.
- Répétons toujours à haute voix le nom des objets représentés.
Comment évolue la lecture dans cette tranche d’âge? Et comment intervenir?
0-4 mois :
le nouveau-né ne peut toujours pas manipuler très bien les objets; le parent sert de support physique pour tenir le livre et le feuilleter. Insistons sur les images qui semblent intéresser l’enfant! Les livres les plus appropriés ont des couleurs contrastées; (noir et blanc par exemple) et des formes qui ressemblent aux visages des personnes.
4-5 mois :
à ce stade, les bébés aiment généralement toucher et mettre dans la bouche, mordre, saisir, tirer; une fois que nous avons choisi un livre de matériel adapté pour que l’enfant soit en sécurité (carton dur ou tissu par exemple, sans petites pièces), laissons-le faire, et montrons notre enthousiasme pour toutes les figures qui l’intéressent. Répétons toujours le nom des objets représentés.
9 mois :
dans cette période, les enfants commencent non seulement à pointer du doigt, mais aussi à observer ce que nous leur indiquons. L’interaction avec le parent est donc renforcée. Maintenons la répétition à haute voix comme un point clé!
12 mois :
Généralement, vers leur premier anniversaire, les enfants commencent à dire quelques mots et, en tout cas, comprennent leur signification. La lecture devient donc de plus en plus interactive, car on peut intervenir en posant des questions: « Où est le chat? » Ou, en indiquant un objet connu, « C’est quoi ça? » et ainsi de suite, en répétant le mot pour souligner la prononciation correcte. Si nous y arrivons, cessons de dire « Non, on ne dit pas ceci, on dit cela… » mais répétons simplement le mot correct. Cela renforcera à la fois l’apprentissage et l’estime de soi de l’enfant 🙂
12-24 mois :
l’exercice de base reste le même, mais l’interaction augmente, le jeu et le vocabulaire s’enrichissent. Les images des livres sont désormais remplies de détails et de nuances. Nous pouvons introduire des parallèles entre les histoires et la vie quotidienne: si nous parlons de la bouche du loup, nous pouvons alors lui demander « Et où elle est ta bouche?! » et « Regards comme elle est grande ma bouche! » ou des choses comme ça. Improvisation et jeux 🙂 .
2-4 ans :
Commençons par des histoires plus longues et structurées. Des histoires qui parlent du monde, de son fonctionnement (mon fils, par exemple, aime les dinosaures et les chantiers); ou des histoires qui parlent de situations similaires à celles que vivent les enfants dans la vie quotidienne (ma fille aime lire des histoires à propos de petites filles qui font face à des situations sociales difficiles, comme les crises de colère, les camarades qui se moquent d’elle, ou qui ne veulent pas partager…).
Livres pour enfants et transitions
Les livres pour enfants sont également hyper utiles pour parler des épisodes difficiles auxquels l’enfant est confronté, tels que l’arrivée d’un petit frère ou d’une petite sœur, l’entrée en crèche ou école maternelle, un déménagement, etc. Le fait d’observer un personnage qui réagit et éprouve ses mêmes émotions servira à mettre un mot sur un concept ou une sensation, ce qui améliorera non seulement l’apprentissage du langage, mais aussi la connaissance de soi; ça lui permettra aussi éventuellement d’exprimer une difficulté du quotidien.
Je me souviens bien, par exemple, combien de fois nous avons lu certains livres en particulier avec ma fille. Il y en fut un, un cadeau de la part d’un couple d’amis quand nous étions sur le point de déménager, qui se révéla extra.
La protagoniste étais une fillette, au même prénom que ma fille, qui bien évidemment, fait face à un déménagement. Nous l’avons lu, relu, exploré, réinterprété jusqu’à la nausée; mais tel fut le soulagement dans les yeux de ma fille quand elle comprit ce qui lui arrivait..!
Forte de cette expérience, j’ai commencé à utiliser les livres pour enfants dans toute le situation. Arrivée du petit frère? Op, voilà le livre (dans ce cas aussi, la protagoniste portait le même prénom, cela a fonctionné encore mieux!)
Période de peurs, cauchemars et difficultés à dormir? C’est parti avec des histoires sur les monstres, l’obscurité, la magie de la nuit. Querelles, crises de colère, propos violents? Nous lisons ce qu’est la colère, les enfants en colère, etc. Et cela me permet de parler plus calmement, faisant peut-être référence aux protagonistes des histoires plutôt qu’à mes enfants directement.
Livres pour enfants et .. le cerveau en évolution
Petite parenthèse pour parler développement du cerveau (je sais.. mais j’adooooreee! 🙂 ).
Vers 18 mois, le cortex orbitaire-frontal, en cours de maturation, commence à stocker des images. Au fur et à mesure que les situations se répètent, ces images sont enregistrées avec les émotions associées; ce sont des images de nous-mêmes par rapport aux autres.
Cette capacité à intérioriser et donc à résumer des situations et des émotions vécues est une étape importante du développement, car elle permet de donner un guide de comportement à l’enfant, même en l’absence de maman, papa ou de l’adulte de référence.
C’est pourquoi, à ce moment-là, nous pouvons commencer à lire des histoires plus complexes. À ce stade, l’enfant dispose d’une petite bibliothèque d’images liées à son expérience et parvient à résumer des concepts plus complexes. Pour cela, nous pouvons utiliser les histoires que nous lisons pour faire référence à des situations personnelles.
Les livres pour enfants sont notre atout .. si nous nous amusons
Je pense que c’est la chose la plus importante, toujours et à tout âge : amusons-nous! Rigolons, rions, jouons, pleurons même si nous sommes émus; mais laissons que livre rime avec plaisir pour tous.
J’ai appris que les livres et les histoires peuvent beaucoup aider nos enfants à réfléchir, à les guider et à apprendre à parler. Mais ça ne marche que tant que ça reste un jeu, un beau moment … Sinon, le sort est brisé.
Je vous conseille cet article, du site Naître et grandir, qui présente une approche intéressante pour la lecture avec ses enfants; détaillée par tranche d’âge : 0-12 mois, 1-3 ans, 3 à 5 ans.
Je cite aussi cette intervention d’une orthopédagogue, qui présente des étapes à suivre pour lire efficacement aux enfants plus âgés.
Je conclus en vous demandant: et vous, qu’est-ce que vous aimez lire? Qu’est-ce que vos enfants aiment? Quel est votre moment préféré pour lire ensemble? Pour nous, toujours avant de dormir; et quand nous rentrons de l’école un peu tard, et nous nous jetons fatigués sur le canapé .. Avant que fille n°1 et fils n°2 commencent à se disputer à propos de ce que maman va lire en premier! Mais ça, .. c’est une autre histoire!
Parlez-nous de la vôtre! Ecrivez nous !
Article intéressant!!! Pour ma part, j’essaye de faire des « temps calme » avec ma fille de 18 mois avec des livres…. mais trop dynamique, elle ne s’y intéresse pas du tout! Les seuls qu’elle aime, ce sont ceux avec des bruitages. Tous les autres sont insignifiants. Ce qui est un peu frustrant pour moi :S J’aimerais tant un moment de partage avec elle en feuilletant un livre tranquillement!!
Je comprends très bien, avec ma fille c’était pareil!! Avec elle, ce qui marchait était lui mettre à disposition plusieurs livres, à la maison ou à la bibliothèque, et la laisser faire, la laisser choisir, bouger, changer de livre.. Il a fallu vaincre ma frustration, car j’aurais bien aimé lire avec elle tranquillement comme tu le dis!.. mais petit à petit, nous y sommes arrivées! D’abord c’était une page, après deux mais pas dans le bon ordre, et ainsi de suite; et maintenant, elle adore!!