Manque de temps pour les activités avec tes enfants? Adopte la Slow Pédagogie
Tu cours, tu stresses. Tu aimerais faire bien plus de choses avec tes enfants; des activités sympas, qui l’aident à s’épanouir. Mais il faut du temps pour s’organiser, et de l’énergie, et cela est parfois compliqué.. Prêt à être inspiré par des nouvelles idées ?
Une interview avec Méline DUTRIEVOZ-BOYER, directrice de crèche, éducatrice, formatrice, accompagnante en parentalité et maman
La frustration du trop faire..
Parfois, mes enfants reviennent à la maison avec leurs petits projets et activités de l’école. Ils ont l’air si fière!
J’adorais faire ce type d’activités lorsque j’étais enfant, mais aujourd’hui, qui a le temps?
Et là, je sens la vague de frustration qui arrive.
Comment ça se fait que je n’ai jamais le temps de me poser et faire ce genre d’activités avec mes enfants?
Je tombe si souvent sur de sites internet qui dévoilent les étapes pour faire les activités créatives et artistiques les plus magnifiques avec ses enfants, et le tout, sans effort ni organisation!
Je rêve, et je file alors me procurer tout ce qu’il faut pour réaliser cela avec les miens..
Mais ça ne marche pas pour nous.
D’abord, car je n’ai jamais ce qu’il faut pour réaliser l’activité, et du coup il faut que je m’organise pour aller l’acheter.
Et puis, quand enfin nous arrivons à nous découper une petite demi-heure toute pour nous.. mes enfants n’ont pas du tout envie de suivre mes consignes et faire la magnifique maison en carton dont je rêvais.
Nous nous disputons, ils partent faire autre chose, la peinture coule au sol et je me sens de plus en plus découragée..
Est-ce que cela t’arrive aussi?
Une nouvelle vision des activités avec ses enfants
C’est quelque mois après ces réflexions, que je rencontre Méline DUTRIEVOZ- BOYER.
Méline est directrice de crèche à Grenoble, formatrice, accompagnatrice en parentalité.. et fondatrice du concept « Slow pédagogie ».
Le sourire chaud, les idées claires, échanger avec elle m’a donné un élan d’énergie et une vision beaucoup plus claire de ce que ça pouvait être une philosophie éducative positive, ouverte et concrète qui réunit épanouissement de l’enfant avec la simplicité pour le parent.
« La Slow pédagogie ce serait donc permettre à l’enfant de déguster ses découvertes afin qu’elles s’intègrent en lui comme des belles expériences.«
Activités avec les enfants et l’approche « Slow Pédagogie »
Méline, ton approche de « Slow Pédagogie » me fait penser un peu à la pédagogie Montessori, là où on incite parents et professionnel de la petite enfance à laisser l’enfant apprendre, explorer et se développer à son rythme et en autonomie. Est-ce qu’il y a d’autres éléments de contact avec les deux pédagogies, et quelles sont, au contraire, les différences?
La pédagogie Montessori préconise l’encadrement des activités sous forme d’atelier, auquel l’enfant est libre de participer, mais qui est néanmoins organisée, avec du matériel spécifique, un temps dédié etc.
L’approche que j’ai appelée « Slow » est plutôt une philosophie où l’activité avec les enfants n’est pas pré-construite, mais s’inscrit dans la vie courante.
C’est pratiquer la vie, ensemble.
Retrouver le plaisir dans les activités avec les enfants
Ça tombe bien car en faite, je pars du constat que les parents ont souvent peu de temps pour tout gérer; et couvent parfois la frustration de ne pas pouvoir dédier suffisamment de temps qualitatif à son enfant.
En même temps, tellement habitués à courir, nous avons aussi du mal parfois à laisser l’enfant faire, à attendre, à rien organiser du tout. Quelles sont les étapes à suivre pour intégrer ces concepts et retrouver ce temps de plaisir avec son enfant?
Je pense qu’avant de pouvoir parler d' »étapes à suivre », pour comprendre et intégrer cette approche nous devons réfléchir au regard que nous portons à la fois sur la définition d’éveil, et aussi sur notre rôle en tant qu’éducateurs:
- Changer notre regard sur l’extraordinaire
- Accepter que notre vision du jeu soit différente de celle de l’enfant
- Prendre en compte les inclinations et intérêts naturels de l’enfant en fonction de son âge.
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Etape #1: Comment changer notre regard sur l’extraordinaire?
Quel est le meilleur souvenir que vous gardez de votre enfance?
Rarement j’entends des réponses autour de jouets ou d’activités extraordinaires.
Le plus souvent, il s’agit de moments passés ensemble, en famille, d’une manière joyeuse: les pâtes fait maison un dimanche midi avec maman, les histoires lues et relues avec papi et mamie, ou la fois où mon papa m’a appris à faire du vélo sans roulettes.
C’est souvent nous, les parents, qui avons des attentes vis-à-vis des activités à faire ensemble.
Pour que ça soit un vrai plaisir, il faut que ça soit remarquable, extraordinaire.
Sauf que pour un enfant, ce qui est extraordinaire est, par exemple:
transformer des draps et une table en cabane un dimanche de pluie;
collectionner des cailloux et des bouts des bois lors d’une balade, pour transformer une bâche en forêt;
Ou encore, faire une bataille de guilis sur le canapé.
Avec ses parents.
C’est pour ça que la Slow pédagogie est une approche, et non pas une méthode.
C’est avant tout une manière de voir les choses, et pour pouvoir l’appliquer, le parent choisit de changer ses lunettes, et de trouver le côté drôle, intéressant et rigolo même dans les tâches les plus normales de son quotidien.
Etape #2: Comment accepter que notre vision du jeu soit différente?
Face à un enfant qui réclame de l’attention et de la proximité, ça ne vous est jamais arrivé de luis dire :
« Attends que je termine de faire.. (le repas, la vaisselle, etc) et après je viens jouer avec toi »?
Dans notre conception du monde, et dans notre culture plus globalement, jouer est une activité quelque peu inférieure, ou en tout cas moins importante des vraies activités de l’adulte, si ce n’est-ce qu’une perte de temps.
Quand nous regardons nos enfants jouer, nous ne voyons pas toujours qu’il est en train d’affiner sa motricité, d’élaborer des nouvelles pensées, de construire son langage et sa vision interne du monde..
Dans son cerveau, c’est une explosion des connexions, et pourtant, nous ne voyons que « un jeu d’enfant ».
Il y a aussi une tendance à faire équivaloir le « jouer » avec le « jouet ».
Or, pour l’enfant, jouer c’est tout simplement apprendre et pratiquer la vie.
Jamais vu un petit heureux de passer la serpillière ou de mélanger œuf et farine?
Ce n’est pas une corvée pour lui, mais une façon d’appartenir, de comprendre son monde, et il le fait par plaisir: il joue, il vit.
Bien sûr, cette façon de « jouer » est d’une part, beaucoup plus simple car elle est intégrée dans notre quotidien, inscrite parmi les choses que nous faisons déjà.
D’autre part, cela implique que le parent d’accepte d’inclure l’enfant dans ses activités d’adulte, en prenant le risque que ça aille beaucoup plus doucement de ce qu’il aimerait.
Cela nécessite un autre regard autour de la notion du temps: nous investissons beaucoup de temps aujourd’hui, pour que ça aille plus rapidement demain..
Quand nos enfants, à force de pratiquer la vie avec nous au quotidien, aurons appris à faire plein de choses, tous seuls.
Etape #3: Enfin, comment prendre en compte les intérêts de l’enfant?
Si les enfants de 4, 5 ans et plus s’investissent très volontiers dans les jeux de rôle, les plus petits aiment être dans la réalité de ce qui les entoure.
Très naturellement, ils vont vouloir aider, contribuer, et faire comme nous.
Une fois posées les conditions pour que l’enfant soit en sécurité, au lieu de l’éloigner des « activités d’adultes », on construit donc l’activité à faire ensemble en lui faisant faire la même chose que nous, avec nous, en fonction de son stade de développement.
Un tout petit de 18 mois pourra très bien renverser de la farine, des pâtes ou de la semoule d’un bol à une autre, alors qu’à 3 ans il pourra couper une courgette ou éplucher une carotte avec des outils adaptés.
Sans parler d’aspirateur et balai, qui sont en général très plébiscités par les enfants..
Laissons-les s’enthousiasmer par ça sans déformer cette vision avec l’image que nous en avons, en tant qu’adultes.
Et si jamais votre enfant est plus grand et vous ne découvrez cette approche que maintenant?
Trouvez ses envies, et recherchez sa coopération là où se trouvent les intérêts de votre enfant. Il pourra après transposer ces compétences de collaboration vers autre chose.
Par exemple, si votre enfant a 5-6 ans et il n’a plus envie de vous aider avec le ménage, mais par contre s’entraîne à écrire.. Vous pouvez demander son aide pour faire la liste des courses, préparer les étiquettes du dressing, etc.
Une fois qu’il aura intégré que aider ses parents lui plaît, ça sera plus simple de demander sa coopération.
Les activités avec des enfants d’âge différente
Comment faire alors quand nous avons des enfants d’âge très différent? En quoi cette approche pédagogique nous permet de passer du temps de qualité avec les 2 (ou 3 ou +) en même temps?
Là encore, j’en reviens à une réflexion en amont.
Lorsque l’on adopte cette approche qui vise à inclure l’apprentissage de l’enfant, via le jeu, dans nos vies au quotidien, nous verrons donc que tout objet d’usage courant peut devenir jouet:
-
les rouleaux de carton peuvent devenir des pistes pour les voitures,
-
les tuyaux de plomberie assument plein de nouvelles formes,
-
pour ne par parler des bouchons et des bouteilles.
Alors que, quand on investit dans de jouets « traditionnels » qui ont une seule utilisation, on se renferme dans une tranche d’âge assez spécifique, lorsque tout matériel devient jouet on s’ouvre à une évolution de son utilisation.
L’enfant de 6 ans utilisera le carton d’une manière bien différente qu’un enfant de 2 ou 3 ans, et pourtant, il s’agit toujours de la même chose.
Voilà que chaque activité ou presque peut se faire ensemble, chacun à son rythme et selon ses possibilités, en lui donnant juste des nuances différentes;
De plus, ainsi faisant, on limite également les bagarres de fratrie autour de la propriété d’un jouet.
Je ne dis bien évidemment pas d’interdire tout forme de jouet classique, mais de choisir en fonction du nombre d’utilisations possibles: les cubes en bois, les figurines, les billes..peuvent être utilisées à chaque fois d’une manière différente, et selon la fantaisie de l’enfant.
Un lapin qui saute, lui, ne fera que ça.
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Activités avec les enfants: avec ou sans jouets?
Pour terminer, une question intentionnellement provocatrice : pourquoi préférer cette approche pour le temps passé ensemble aux jouets préfabriqués « classiques » ?
Je pense que c’est à chaque parent d’en découvrir la différence!
Ça dépend du point de départ de la démarche.
Si le parent est satisfait de sa manière de passer le temps avec son enfant, il n’y a pas forcément besoin de la remettre en question.
Mais si l’on ressent cette frustration qui nous pousse à chercher des solutions différentes, c’est là où cette approche peut l’interpeller.
Souvent, ce genre des jeux simples, cette façon de partager le quotidien avec nos enfants nous renvoie à notre enfance, et aux moments de plaisir dont nous avons gardé le souvenir.
Si vous ressentez de la frustration vis à vis du temps passé avec vos enfants, j’ai un seul conseil: écoutez-vous.
Il s’agit de changer notre regard sur l’ordinaire, avec juste un brin de simplicité.
Ressources utiles
Envie d’aller plus loin avec cette approche? Voici quelques ressources qui peuvent être utiles!
La liste du matériel conseillée à stocker à la maison
Attention: si vous voulez tout de même éviter que votre enfant mette tout partout, limitez les quantités pour ne pas risquer le débordement de l’enfant :
- cartons
- rouleaux en carton
- bouteilles de tout genre
- coupeaux de bois
- figurines (d’animaux par exemple)
- bouchons
- ficelles
- tuyaux
tout ce qui réveille la curiosité de votre enfant lors de vos promenades! Amenez toujours avec vous une boite ou en bocal: ça occupera votre enfant pendant la balade, et à la maison!
Les sites internet à consulter
Le site de Méline autour de la Slow Pédagogie. Vous y trouverez aussi ses livres et ses propositions de formation.
Le site marchand de Hop Toys: ils proposent des jeux ludiques adaptés à l’apprentissage, ainsi que des solutions pour enfants et seniors avec besoins spécifiques.
Les livres
Je vous propose ici ceux de Marie Gervais (liens affiliés) :
« Ça va cartonner! » Des créations à faire avec le carton et d’autre matériel de récup.
Pour les plus grands, qui ont envie d’expérimenter avec ce qu’il y a à la maison : « Petites expériences avec ses sens«
« Le Slow Parenting » pour ceux qui aiment apprendre avec la théorie aussi.